L'école D s'appuie sur Vernes et le compte DH. Elle ouvre sur cette base et intervient sur la même et celle du Delta, sans grande considération du nombre de points d'honneurs ni de la qualité de la couleur.

L'école H exclut d'ouvrir, comme d'intervenir au niveau minimum, avec moins de 13H et exige encore, pour l'intervention, une couleur de qualité. Ses tenants ouvrent moins, partant empaillent souvent...

La doctrine classique (voir, dans le dernier Bridgeur, les conseils de Lévy à cet égard; qui ne traite malheureusement pas des mains très excentrées...) est à mi-chemin.

V, le «renfort», est partisane de l'école D, le reste de l'équipe de l'autre. Elle ouvre, en Ouest, en face de F, de 1P et cela donne:

Ouest E 1 2 2 3! 3 4! Passe

(6P est «laydown»!...)

On lui reproche, au dîner, d'avoir ouvert, arguant qu'un Passe ou une ouverture de 3P eussent plus aisément conduit à 6P.

S (qui jouait dans une autre équipe), chantre de la doctrine H, admet que la main est belle et mérite l'ouverture de 1P mais se ravise pour se rallier à une ouverture de 3P. A, partenaire de S, tente de ménager la chèvre et le chou et suggère Passe, «pour attendre et voir».

Cela heurte ma logique: comment un Passe, qui montre une main plus faible que l'ouverture (!), serait-il plus propre à conduire au chelem qu'une enchère plus forte?...

La main compte 14DH et 3P, qui dénie bien évidemment une force d'ouverture, est exclue. Cette enchère viendrait avec le Roi de Trèfle en moins! Je préférerais nettement l'ouverture de 4P!

Testée le lendemain, une autre paire tenante de l'école H, nullement au courant de l'affaire, enchérit comme ceci: 3P - 4P et fin. CQFD! La même avoue n'être pas capable d'atteindre le chelem après Passe.

Je défie cette école de trouver, après Passe, sur ouverture de 1C, une enchère ou une séquence qui puisse signifier: «J'ai passé, mais j'ai l'ouverture, un long Pique et un fit Cœur»! Et quiconque d'appeler ce chelem après Passe!

Le débat est clos: toute autre action que l'ouverture de 1P empaille!

Comment enchérir après l'ouverture, normale, de 1P et la réponse de 2C.

3C est la redemande «normale», presqu'automatique: Fit Cœur par un gros honneur troisième, main correcte, forcing de manche (2C, autoforcing, garantit 11H et «on ne badine pas avec les majeures»! et de nos jours pas non plus avec les mineures: voir donne 143). Elle conduit automatiquement au chelem, car le répondant, double-fitté et muni de 17H-18DH-18DHS, ne saurait s'arrêter en chemin si le contrôle Carreau ne fait pas défaut et s'il ne manque pas deux clés.

Le plus simple serait, sur 3C, de prendre d'emblée la direction des opérations par 4T puis, sur 4K, par 4SA. 4T camoufle le fit Pique mais l'ouvreur serait néanmoins tenu de donner son contrôle Carreau (rappelons que celui qui démarre le processus des Cue-bids de contrôle commence où il veut: voir donne 88) et l'on pourrait conclure à 6C sans problème.

Mais un grand chelem reste possible: l'ouvreur peut compter jusqu'à 16H et rien ne lui interdit d'être sixième à Pique:

R D x x x x   D x x   A x   x x

R D V x x   D x x   A x x   R x   A x x   A R x x x   D x   A x x

(et dire que ni S ni F n'auraient ouvert la première main...!)

Il conviendrait donc de le prospecter par 3P car la collaboration de l'ouvreur en sera la clé, comme le mariage à Pique! et cette collaboration ne s'entend que s'il est dûment informé de la situation, singulièrement du fit Pique! Mais laissons là cette question car 3C n'est pas, en l'espèce, une bonne redemande.

Si le répondant n'a qu'un singleton Pique, la main de l'ouvreur ne vaut plus grand-chose, en tout cas plus son ouverture! C'est l'aspect fragile du pur compte DH: fittée, une main distribuée peut s'avérer très puissante en attaque, mais ne plus rien valoir misfittée, seulement du sable qui coule entre les doigts. C'est bien le cas d'une couleur septième par Roi-Valet: six levées avec seulement la Dame seconde en face, aucune, à un autre atout, avec un singleton ou une chicane! Faut-il signaler, par l'ouverture, l'important potentiel d'attaque de la main, au risque de se retrouver débordé en cas de misfit? Faut-il passer au risque d'empailler? C'est le débat...

C'est en tout cas pourquoi la redemande à 2P se justifie (la main risque d'être trop faible pour 3C; à ce stade, elle ne vaut pas encore 3C!): l'on retarde le fit Cœur pour obtenir davantage d'informations du répondant, notamment un fit Pique, soit immédiatement (l'idéal), soit plus tard d'un honneur second en recherche d'atout septième; par exemple:

Ouest E 1 2 2 3 3 3... ...

3 :   Petit fit troisième ou gros honneur second 3 :   Idem, car un gros honneur troisième se serait manifesté par 3P sur 2P!

Et maintenant la main de l'ouvreur est splendide. Je lui suggérerais 4K (4SA serait excessif: 3T n'était peut-être qu'une recherche de manche avec 12H; 4K, et non 4T, parce qu'on voit bien le problème Carreau du répondant). Avec une belle main, celui-ci devrait comprendre la situation et poursuivre le dialogue, s'arrêter à 4P avec une toute petite main.

A l'inverse, si aucun fit Pique ne vient, l'on ne regrettera pas d'avoir retardé le fit Cœur et donné une moins belle image de la main. L'on concluera à 4C et le répondant verra alors un petit fit troisième ou une toute petite main. Ce ne sera pas faux.

On le voit, la redemande à 2P était fine et intelligente. Oui, en un sens l'ouvreur a un peu honte de son ouverture et c'est pourquoi il ne soutient pas d'emblée (il n'a pas tort, on l'a vu). Ce n'est pas une raison pour renoncer à ouvrir.

Pourquoi cette redemande à 2P n'a-t-elle pas été soutenue à 3P? Mystère et boule de gomme! Sur 3P, qui montre le fit troisième par un gros honneur et des ambitions (sans doute, sur un 2P souvent limité, 17DHS+), c'est l'ouvreur qui prend la direction des opérations: avec le double fit et 17DHS en face, le petit chelem est une certitude. Il peut questionner d'emblée mais, ici encore, la question du grand chelem se pose (7 Piques + 5 Cœurs + 2 As = 14!):

Ouest E 1 2 2 3 4 4... 4SA ...

4 :   OK pour vos ambitions: ma main est correcte (4K, pour forcer 4C, est envisageable si l'on est bien certain qu'il ne dénie pas le contrôle Trèfle! v. d. 82 et 88) 4 :   Probablement As et Roi de Cœur dans une main qui confirme ses ambitions 4SA :   En route pour le grand chelem! (l'absence de contrôle Carreau en face, annoncée par 4C, promet de belles choses; mais il manquera un As et l'on concluera à 6P, plus sûr que 6C)

Qu'est-ce que cela donne en LTTC? Les enchères sont les mêmes jusqu'à 4C mais prennent une tout autre signification:
3P : à partir de 13!
4T : «Je n'ai tout de même pas de quoi dire 3SA»
4C : «Je vous dévoile mes ambitions; avec un contrôle Carreau, veuillez poursuivre (en Blackwood ou Lackwood)!»

Et voilà une convention qualifiée d'excellente qui, à la première occasion, pêche par son grave défaut: elle est artificielle! Cela implique un cruel manque de souplesse, de dialogue, partant de collaboration des deux jugements des deux joueurs: ici l'ouvreur doit obéir et questionner, en vertu de son contrôle Carreau, sans savoir où l'on va, singulièrement sans connaître As et Roi de Cœur. Et il n'apprend les ambitions du répondant qu'à 4C. En enchères naturelles, 3P les montre déjà et 4T est déjà légèrement encourageant; et 4C poursuit cette dynamique en montrant quelque chose à Cœur. C'est comme le fameux 3T «rattrapatoire» sur la redemande à 2SA après 1/1: satisfaisant en apparence, bien trop rigide en pratique... L'avenir est aux Texas (c'est Bertrand Romanet qui serait content!), pas aux conventions artificielles, rigides et dirigistes.

Bon! Il s'en sortira. Il peut tenir pour établi que le répondant contrôle les Cœurs et se passer de la dispendieuse Lackwood (5C - 5P-41; et les Roi sur un 5SA-30? comment fait-on? le cas échéant la Dame d'atout?): 4SA. Et si 5T (4 clés), 5SA (avec dix atouts, la Dame d'atout est prise!) et 7P sur 6C (le Roi de Cœur!).

mh

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