POLITIQUE EN TPP

d'après PACAULT/BONAFOS
Le tournoi par paires, Les enchères
Issy-les-Moulineaux, 2001



Le tournoi par paires est un art particulier. Pour le puriste, un jeu de sauvages !

Songez que vous pouvez rester en rade à une partielle quand le grand chelem est sur table et décaisser moins sur cette donne qu'à la suivante où votre seul crime aura consisté à livrer une malheureuse levée supplémentaie à un contrat partiel ! (D'une certaine manière, les primes de manche et de chelem n'existent pas en TPP !)

A moins que le tournoi en question ne soit qu'un entraînement, un banc d'essai pour votre subtil système d'enchères, celui-ci doit lui être adapté dès lors que vous le jouez sportivement, c'est-à-dire pour l'emporter. Et tout change radicalement, les enchères à deux, en passant par les enchères de chelem, comme les enchères à quatre.

Les enchères à deux

Ainsi, avec ceci :

D10xx
RD
AD10x
xxx

Vous répondrez 2T sur l'ouverture de 1C de votre partenaire avant de conclure à 3SA ! (Et sur entame Carreau, pour le Valet de droite, vous prendrez de l'As !)

Considérons quelques maximes de Pacault :

« L'on joue au bridge, pas aux enchères » !

Ou encore, sur le thème « En TPP il faut prendre des risques, par exemple pour donner une entame ou pousser l'adversaire » :

Parce qu'un partenaire qui annonce du jeu, en compétitives en TPP, n'en a pas !

Ainsi :

Par exemple avec ceci il faut, en TPP :

ARV6   après   1T - 1P
DV4            2T - ?
DV
AR52

déclarer sans ambages 6SA, et au diable Blackwood et contrôle Carreau !

Avec ceci, toujours en TPP, il faut

RD42    après   1C - 2SA (relais fitté 13-16HS [Pacault !])
AD654           3T - 3SA (maximum, gros honneur à Coeur)
87              ?
A3
déclarer 4K ! contrôle Carreau ! suivi de 4SA.

Les enchères compétitives

En match, les objectifs d'une intervention sont, dans l'ordre de priorité :

  1. Découvrir une manche
  2. Lancer le camp dans la bataille des partiels
  3. Indiquer une bonne entame
  4. Découvrir une bonne défense

En match, il faut donc sans hésiter intervenir à 1P avec le 8 cinquième dès l'ouverture, mais pas en TPP où l'ordre de priorité des objectifs est différent :

  1. Indiquer une bonne entame
  2. Lancer le camp dans la bataille des partiels
  3. Découvrir une manche
  4. Découvrir une bonne défense

Dès lors que l'indication d'entame est une priorité, la qualité de la couleur d'intervention devient primordiale. L'on attendra donc une main très forte pour intervenir dans une couleur de piètre qualité, mais l'on n'hésitera au contraire pas à intervenir à 2T, sur l'ouverture de 1P à droite, avec ceci :

Rxx
xx
xxx
ADV10x

Comme, au niveau de 1, l'on peut intervenir dans une couleur seulement quatrième, mais de très bonne qualité. Ou même avec ceci, de 1P, en quatrième, après une ouverture de 1T à gauche et une réponse de 1C à droite, bien que vulnérable :

ARVxx
xx
xxxx
xx

Les deux fois à seule fin de donner une bonne entame ! Ainsi, en TPP et en intervention, la qualité prime la longueur.

L'intervention par Contre est bien délicate en TPP puisque, si le déclarant est du camp de l'ouvreur, il risque bien de jouer à cartes ouvertes et marquer un top sur une simple partielle. L'on attendra donc plutôt 14H, malgré une bonne distribution, avant d'y songer. Même la main idéale (4441) nécessitera 12H.

Considérons maintenant cet adage de Pacault :

« Pas de bicolores précisés en TPP ! ».

Il s'explique d'une part que l'emploi d'une enchère de bicolore est rare en TPP, d'autre part qu'il faut conserver à 3T (voire même à 2K) son sens naturel.

Emploi rare, parce que rien n'est plus inconfortable que de se retrouver en flanc après avoir décrit dix cartes de sa main : trop souvent le déclarant réalisera une surlevée indue et, eu égard à la fréquence, bien plus coûteuse que le bénéfice d'une défense ou d'une manche dans la couleur la moins chère. L'on attend donc, pour une enchère de bicolore, deux couleurs de qualité égale (pour des motifs liés à l'entame) et bien 14H pour donner à son auteur de bonnes chances de jouer le coup.

Cette rareté démunit les enchères de bicolores précisées de leur intérêt et donne la priorité au saut naturel à 3T (voire à 2K).

Les enchères à saut jouissent d'une importance particulière en TPP dès lors qu'elles servent à décrire une main douée de levées de jeu mais pauvre en levées de défense, bien que relativement puissante et constructive en attaque, pour indiquer au partenaire des possibilités de surenchère et l'assurance que le contrat adverse ne chute pas. Le « Jump » est ainsi est un « barrage constructif » provenant d'une main puissante en levées de jeu et encore munie d'une reprise, l'As de la couleur en question ou un As extérieur.

Un As, pour ne pas tisser la corde pour se pendre, pour éviter que l'enchère ne pousse l'adversaire à demander, parce qu'il est dans le brouillard, un 3SA imperdable qu'autrement il n'aurait jamais demandé. Ne produisons pas la seule enchère qui conduise inexorablement l'adversaire au top ! Si c'est le cas, il reste le « Contre chasseur », applicable chaque fois que l'adversaire demande un 3SA totalement hors champ : s'il chute, tout va bien ; s'il gagne, même « nature », vous ne marquez que 10 ou 20 % et n'avez plus grand-chose à perdre. Contrez-le donc, sans risque (0 % au lieu de 10 % ou 20 %) !, en vertu du principe que, « en TPP, il n'y a pas de note inférieure à zéro » ! et parfois le verrez-vous dégager et vous retrouverez-vous à 60-70 % (vous pariez à +50-60 % contre -10-20 % ; excellent pari).

Le partenaire peut ainsi surenchérir, en attaque ou en défense, avec un semi-fit, et un 3SA adverse demandé dans le brouillard recevra, grâce à cette reprise, à cet As, l'entame mortelle. A l'inverse, le partenaire ne surenchérira pas sur une intervention sans saut avec seulement un semi-fit, bien que relativement fort, parce qu'il sait celle-ci motivée peut-être exclusivement par le souci de donner une bonne entame, au contraire du jump qui suggère la surenchère malgré une couleur parfois de mauvaise qualité.

Autrement dit l'intervention sans saut vient toujours d'une couleur de bonne qualité, malgré une main parfois faible (au point qu'avec une couleur très solide, il est obligatoire d'intervenir quelle que soit sa force et même le palier !), l'intervention avec saut d'une main riche en levées de jeu, parfois avec une couleur de piètre qualité ; et cette différenciation serait si importante en TPP qu'il ne faudrait pas la sacrifier aux Michael's précisés.

Même la loi des levées totales de Vernes n'intervient qu'occasionnellement en TPP. En match, lorsque l'adversaire réveille ou surenchérit au niveau de 3 sur notre partielle du niveau de 2, souvent l'on sait qu'il va chuer, de un, parfois même de deux, sans certitude que soi-même l'on pourra gagner au niveau de 3, et l'on laisse donc jouer avec la certitude de marquer dans la bonne colonne, parce que cette issue est suffisante. En TPP, en revanche, les 50 ou 100 point totaux que vaudront la chute contrée ou les deux chutes ne compensent largement pas les 110 ou 140 points totaux de la partielle et cela conduit à la surenchère au niveau de 3 malgré huit atouts seulement.

L'on déduit de ce qui précède, notamment de l'exigence d'une couleur très solide en intervention sans saut, que certaines mains fortes devront être passées. Mais rien ne leur interdit l'intervention retardée, arme redoutable en TPP. Une telle intervention, bien que beaucoup plus dangereuse qu'une intervention immédiate (mais, en TPP, il n'y a pas de note inférieure à zéro !), s'avère très gênante pour l'adversaire préalablement moins bien informé et alors souvent démuni pour surenchérir. En outre elle indiquera au partenaire une certaine force mais une piètre qualité de couleur et lui permettra le cas échéant d'en éviter l'entame.

En résumé :

Deux autres principes méritent encore considération :

En match, défendre pour 500, contre 420, est sans importance. En TPP, l'importance est inverse et cela conduit à renoncer au sacrifice malgré la manche adverse certaine, sauf si l'on peut d'avance en contrôler la pénalité, par exemple grâce à une intervention préalable du partenaire à saut ! L'on voit encore ici le rôle important du jump en TPP (qui, on l'aura compris, est tout sauf un barrage, mais l'indication d'une main riche en levées de jeu, donc forte en attaque, mais faible en défense, qui suggère la surenchère).

Lorsque, sur une défense, l'adversaire en attaque surenchérit au palier de 5, le laisser jouer, parfois gagner, est un meilleur pari que le risque d'une pénalité excessive dès lors que la comparaison s'effectue sur de nombreux autres résultats : s'il gagne, ce sera avec le champ et la note ne sera pas mauvaise. Parfois il chutera et la note sera excellente, tout le monde n'ayant pas défendu jusque là. L'on peut prendre des risques pour le pousser au palier de cinq, parce qu'il sera enclin à s'y rendre de crainte d'une pénalité insuffisante, mais pas au delà : la surpénalité risque de coûter cher pour de rares bons coups.

Car n'oublions pas que :

« En TPP, le partenaire n'a jamais la main espérée » !

En général

Tout cela parce que, en TPP, la moindre levée supplémentaire livrée est capitale, tragique ou juteuse, et peut, en certaines circonstances, coûter ou rapporter davantage qu'un grand chelem manqué ou finement appelé !

Enfin ceci sur le but :

« Il est aussi rare de réaliser 65 % dans un tournoi par paires en ayant marqué cinq zéros qu'en ayant pratiqué le style du duplicate. Le style du TPP doit donc être suffisamment sérieux pour éviter les zéros, mais suffisamment agressif pour marquer des bons coups ».

Les buts, en TPP, sont donc :

Mais, « une fois le champ battu [(60 % ou plus)], seule une quasi-certitude justifie un risque supplémentaire ».



Tout ce qui précède est un résumé extrême, mais relativement fidèle, de Pacault/Bonafos, Le tournoi par paires, Les enchères, Issy-les-Moulineaux, 2001. Les exemples, les adages et les citations entre guillemets en sont issus.



mh / juin 2003 Autres
Documents
Fermer  Fermer